Dans une vingtaine de pays, les créateurs d’info attirent plus l’attention que les médias traditionnels. Une bascule générationnelle et géographique.
Le Reuters Institute alerte sur une nouvelle hiérarchie de l’attention : dans plusieurs pays du Sud global, les « news creators » captent davantage l’audience que les médias classiques. En cause, la défiance, la porosité des plateformes et une offre éditoriale perçue comme plus directe. Cette tendance touche en priorité les moins de 35 ans et interroge directement les modèles d’influence, de distribution et d’engagement de l’information.
1. Pourquoi ce sujet est crucial aujourd’hui ?
Parce qu’il remet en cause l’avantage historique des médias établis dans leur rôle de prescripteurs d’agenda. Selon le Reuters Institute, dans des pays comme le Nigeria, le Mexique ou les Philippines, « les créateurs d’info ont un impact significatif et atteignent un large public ». Le rapport souligne une fracture générationnelle nette : chez les moins de 35 ans, 48 % consomment l’actualité via des créateurs, contre 41 % via les médias traditionnels. Le statut de « source d’info » n’est plus garanti par l’institution, mais par la visibilité et la proximité perçue.
2. Ce qu’on croit savoir
On pense souvent que l’autorité éditoriale repose sur la qualité, la vérification, la longévité. Mais l’attention bascule ailleurs. YouTube, TikTok et Instagram deviennent des points d’entrée plus efficaces pour les formats explicatifs, là où les médias « peinent à émerger ». Et les formats les plus équilibrés « sont souvent surpassés par des contenus plus partisans ou divertissants ». L’influence se joue désormais sur des critères algorithmiques, pas sur des chartes déontologiques.
3. Ce que ça change ailleurs
Au Nigeria, 61 % des répondants déclarent suivre régulièrement des créateurs d’info, contre 43 % pour les médias. À l’inverse, en Allemagne, seuls 10 % prêtent attention aux créateurs, contre 17 % pour les journalistes. Le facteur clé ? Le poids des marques historiques et la maturité du marché. Dans les pays où l’offre médiatique reste forte, les créateurs sont « l’exception plus que la règle ». Mais dans les zones de forte pénétration sociale, ils prennent l’ascendant.
4. Le vrai enjeu à ne pas rater selon Upgrade Media
Il ne s’agit pas d’ajouter des créateurs maison dans les rédactions, mais de comprendre pourquoi leur modèle fonctionne. Le Reuters Institute note que « les créateurs les plus suivis ne sont pas nécessairement ceux qui atteignent des millions (de vues) », mais ceux qui « fournissent une valeur régulière à une audience précise ». C’est cette logique de niche fidélisée, non de masse volatile, qui devrait inspirer les stratégies éditoriales : produire moins, mais plus distinctif, avec une relation incarnée.
5. À tester dès demain
- Cartographier les créateurs influents dans son pays/secteur pour repérer les angles morts éditoriaux
- Expérimenter des formats explicatifs natifs YouTube/TikTok autour des temps faibles actu
- Valoriser l’incarnation éditoriale au sein des rédactions (voix, posture, constance)
Pour en savoir plus :
Mapping news creators and influencers in social and video networks (reuters institute)
News creators get more attention in countries where traditional media struggles (Nieman Lab)
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