Sur les autoroutes de l’information, un tout petit fichier texte vient de se faire écraser ; le problème, c’est que c’est vous qui êtes en sang.
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Soyez honnête. Jusqu’à présent, vous étiez vous vraiment demandé ce que faisait le fichier robots.txt ? Bien sûr que non, notamment parce que vous avez des choses plus urgentes à faire que de rechercher tous les petits fichiers texte qui permettent au web de fonctionner.
Robots.txt est un minuscule fichier texte qui précise ce qui peut et ce qui ne peut pas accéder à votre site web. Plus précisément, il donne ou refuse l’autorisation aux moteurs de recherche. Tout a commencé dans les années 90, lorsque des ressources matérielles limitées signifiaient que des moteurs de recherche trop enthousiastes pouvaient faire planter un site, mais depuis lors, c’est devenu un accord entre gentlemen qui permet au web de fonctionner.
Jusqu’à aujourd’hui.
L’IA, du moins entre les mains de certaines entreprises, ne semble pas respecter le fichier robots.txt et se contente de l’écarter pour non seulement fouiller votre contenu, mais aussi le voler allègrement.
L’ancienne promesse était que si vous laissiez les moteurs de recherche accéder à vos informations, c’était en échange de la création d’un lien vers vous.
Mais la nouvelle génération de moteurs de recherche, tels que Perplexity et Arc Search, évite les inconvénients des liens retours et se contente de fournir des réponses à l’utilisateur.
En soi, cela conduit à repenser la relation entre les moteurs de recherche et les éditeurs.
Cependant, des nouvelles de Forbes montrent que la situation est encore plus grave.
Forbes publie Wired, et l’équipe de Wired a découvert que Perplexity ne se contentait pas d’ignorer le fichier robots.txt, mais qu’il fournissait des informations que l’on ne trouve que dans les articles de Forbes, sans même mentionner le nom de Forbes. Il s’agit en fait d’un piratage de l’IA. Le magazine Wired a même fait mieux en découvrant que l’article qu’il a ensuite écrit sur le piratage de Perplexity était piraté par Perplexity.
Certaines entreprises exigent de l’argent pour que les nouvelles générations d’outils de recherche IA puissent accéder à leur contenu, un véritable paywall qui implique de négocier les clés de l’interface de programmation d’applications qui permet aux robots d’accéder au contenu. Plus personne ne s’attend à ce que robots.txt soit respecté.
S’il s’agit d’une option pour Reddit ou pour les journaux qui ont les poches pleines et beaucoup d’avocats, c’est une solution moins évidente pour la presse locale.
Face à la double menace du vol de contenu et de la perte de trafic par référencement, il peut sembler tentant de se retrancher dans le château et d’ériger un mur payant. Cependant, comme tout expert en siège médiéval vous le dira, cette mentalité ne fonctionne que si vous avez suffisamment de provisions à l’intérieur du château.
Le problème c’est que si nous voulons tous empêcher les envahisseurs de l’IA d’entrer, nous voulons vraiment, vraiment, accueillir non seulement nos habitués, mais aussi de parfaits inconnus qui pourraient s’intéresser à ce que nous proposons.
En effet, le hard paywall présente plusieurs caractéristiques :
Blocage total du contenu : il empêche tout accès au contenu sans abonnement, réservant tous les articles aux abonnés payants uniquement.
Confrontation immédiate : les lecteurs rencontrent le paywall dès qu’ils essaient de lire un article premium, les obligeant à s’abonner pour continuer.
Stratégie stricte : ce modèle est la forme la plus rigide de paywall, potentiellement efficace pour les lecteurs les plus engagés mais risquant de faire fuir ceux moins impliqués.
Augmentation de la visibilité des contenus payants : en augmentant la visibilité des articles payants, plus d’utilisateurs voient le paywall, ce qui peut accroître les conversions.
Cependant, ces points sont désormais en décalage avec les besoins actuels des éditeurs, qui doivent au contraire ajuster leur stratégie de contenu avec finesse et subtilité pour attirer des utilisateurs qui ne les connaissent pas forcément. Même les journaux locaux et hyperlocaux sont maintenant confrontés à YouTube et TikTok, et les murs payants ne sont pas l’arme de choix dans cette bataille.
L’enjeu est d’utiliser vos données sur les comportements de vos lecteurs pour mieux les servir :
Blocage total du contenu : tout le monde n’est pas le Financial Times et ne peut se permettre une telle stratégie. Si vous mettez en place un paywall, commencez à y faire des exceptions pour inciter les utilisateurs à découvrir et apprécier votre contenu.
Confrontation immédiate : soyons stratégiques et appliquons le paywall sur les contenus auxquels les lecteurs attribuent une grande valeur.
Stratégie stricte : seuls quelques médias peuvent utiliser un hard paywall. Dans un environnement concurrentiel marqué par l’apparition des navigateurs intelligents et de l’IA dans le Search, il est essentiel d’adopter des stratégies plus subtiles.
Augmentation de la visibilité des contenus payants : cette stratégie est dépassée et ne s’applique qu’à de rares médias de référence comme le Financial Times ou le Wall Street Journal. Pour la presse de proximité, elle serait contre-productive.
En sommes, plus que jamais, une stratégie de contenu informée par l’IA, qui lie intelligemment le fond et la forme et met en avant les valeurs du média, est essentielle pour s’adapter aux besoins des utilisateurs aux moments clés où ils choisissent de s’informer.
Ce n’est pas une mince affaire. Elle nécessite une évaluation rapide, voire immédiate, des données, afin de fournir les bonnes informations à la bonne personne de manière à ce qu’elle en veuille plus – suffisamment pour payer pour cela. La bonne nouvelle, c’est que cela aussi est en train d’arriver, grâce à l’IA. Bizarrement, alors même que nous combattons la première vague de pirates de l’IA, nous devrions ouvrir la porte latérale et demander aux gardiens intelligents de l’IA comment mieux attirer les visiteurs du bon genre.
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