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L’IA vient-elle de voler le travail de ChatGPT ? Et si c’est le cas, pourrait-elle aider les éditeurs de presse traditionnels ?

Il est impossible d’éviter l’IA de nos jours, et il y a de nombreuses raisons de s’en méfier, mais l’IA bon marché et puissante arrive, et elle pourrait vraiment donner un nouveau souffle au contenu existant. Il ne s’agit pas seulement de balisage automatisé, mais bien de transformer les archives en contenu animé, chantant et dansant pour le public d’aujourd’hui. 

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Même si l’on se réfère aux normes vertigineuses de la perturbation de l’IA, cette semaine a été haletante.  Alors que Paris est brièvement devenue « la capitale mondiale de l’intelligence artificielle », le lancement de DeepSeek-R1 a ébranlé les géants de l’IA existants. En l’espace de quelques jours, les opérateurs historiques américains ont pointé du doigt et affirmé que DeepSeek avait triché en les copiant. Ce qui est hilarant pour ceux d’entre nous qui travaillent dans les médias, puisque l’IA a été construite de manière éhontée en utilisant systématiquement notre contenu, ce que quelques commentateurs se sont empressés de souligner. Le plus intéressant, c’est qu’après une année où nous avons vu nos propres moyens de subsistance menacés par l’IA, l’arrivée de DeepSeek signifiait que ChatGPT venait peut-être de perdre son propre emploi… au profit de l’IA

Il est trop tôt pour se réjouir, mais il est temps d’y regarder de plus près

Il est malheureusement trop tôt pour schadenfreude (se réjouir du malheur des autres), mais quoi que fassent les grands acteurs de l’IA, la principale perturbation pour nous, spectateurs, est que le modèle de DeepSeek est proposé aux entreprises pour une fraction du prix des géants établis. Ce qui rend le développement et l’exploitation d’applications d’IA spécialisées abordables pour des acteurs beaucoup plus petits.

Pour certains, cela ne fait qu’accélérer l’adoption de l’IA et les menaces qu’elle entraîne. N’oublions pas que le Sommet pour l’action sur l’Intelligence Artificielle de Paris a inspiré non pas un, mais trois contre-sommets, tant la menace de l’IA est perçue. N’oublions pas non plus qu’une utilisation de l’IA est très mal acceptée par les personnes les plus importantes, à savoir notre public.

Mais là où l’IA pourrait réellement aider les éditeurs de presse, sans miner la confiance du public, sans menacer les emplois humains ou sans négliger la qualité, c’est en revitalisant nos archives. Nous considérons tous nos publications archivées comme une richesse. L’industrie de l’IA les a utilisées pour gagner des millions. Trouver les joyaux dans les archives, sans parler de les dépoussiérer et de les présenter sous de nouvelles formes pour de nouveaux publics, c’est précisément ce que l’IA peut faire pour nous.  Une IA plus abordable devrait en théorie permettre à des titres plus modestes, ou mieux encore à des partenariats entre titres, d’utiliser les dernières technologies pour valoriser leurs trésors cachés.

Que peut donc faire l’IA pour les archives ?

Nous savons ce que vous pensez : la revitalisation des archives grâce à l’IA est un sujet dont on parle depuis des années, bien avant que l’IA n’atteigne son niveau de développement actuel. En 2022, le ministère français de la culture parlait déjà de l’IA pour redonner vie aux documents, notamment avec le projet Socface. Depuis lors, le mariage de la reconnaissance optique de caractères et de la puissance de l’IA a définitivement apporté de nouvelles possibilités à la recherche d’archives, y compris la capacité de « lire » et de faire resurgir des documents manuscrits. 

Dans la plupart des cas, cependant, la « revalorisation » des archives s’est traduite par la vente par les journaux de l’accès à leurs archives aux sociétés d’IA elles-mêmes, comme dans l’exemple de l’AFP et de Mistral. Les critiques soulignent qu’il s’agit d’une approche qui intéresse surtout les grandes publications et qui risque d’entraîner une perte de contrôle. Ainsi, Press Gazette du Royaume-Uni propose un guide pratique pour savoir qui met en place des partenariats et qui au contraire intente un procès. Ce doute sur la question de savoir s’il faut coopérer ou se faire concurrence a conduit à des prises de position déterminées pour faire cavalier seul et éviter les sociétés d’IA, comme Ouest-France qui travaille avec l’université de Rennes

Cependant, l’accent est mis sur les capacités de l’IA à identifier le contenu, faciliter la recherche (avec des requêtes en langage naturel, par exemple) et faire resurgir les anciens documents. L’étiquetage par l’IA permet d’indexer les archives avec une rapidité et un niveau de détail qui rendent beaucoup plus réaliste l’interrogation d’archives entières par des journalistes pressés, à la recherche de requêtes très spécifiques. 

Des archives activées par l’IA qui (en)chantent et dansent

Et si l’IA, à un prix abordable, nous permettait d’aller plus loin et de donner une nouvelle vie aux archives, en présentant des contenus approfondis d’une nouvelle manière pour un nouveau public ?

Regardez ceci :

Il s’agit d’une présentation multimédia d’un article long, créé par Jaemark Tordecilla, pour le Philippine Center for Investigative Journalism (PCIJ).  Ce qui est remarquable, c’est que cette démonstration multimédia de qualité d’un sujet sensible a commencé par un article long format, et que tous les éléments multimédias ont été créés à l’aide de l’IA (et, bien sûr, d’une bonne dose de talent de la part de Jaemark). Il y a seulement quelques années, la plupart des éditeurs de presse auraient exclu cette possibilité à cause des coûts impliqués. Aujourd’hui, l’IA rend la chose possible et, ce faisant, offre l’énorme possibilité de réinventer les articles textuels longs, tirés des archives, sous forme d’histoires multimédias audio/vidéo pour attirer un public très différent. A l’instar de la vidéo ci-dessus sur Matobato, où sont utilisés des outils qui transforment les photos en dessins linéaires, MidJourney pour les images originales créées par le texte, et la voix off créée à l’aide de 11Elevenlabs qui transforment l’histoire.

En effet, la vidéo « making of » de Jaemark explique l’ensemble du processus et donne une bonne idée du temps et des compétences nécessaires (y compris les solutions de contournement nécessaires pour corriger les limitations de l’IA).

Nous n’essayons pas de sous-estimer la créativité nécessaire pour bien faire les choses, mais là encore, nous apprécions le rôle de l’IA dans le renforcement des compétences du personnel, et non dans son remplacement. Au contraire, à Upgrade Media, il nous semble que c’est précisément le type d’approche imaginative qui peut transformer un contenu existant en une nouvelle forme de journalisme, pour de nouveaux publics, le tout réalisé par un journaliste (talentueux), alors qu’auparavant une équipe entière aurait été nécessaire.

C’est cela faire parler des archives.


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